Homme de Guerre
Je vous parlerai aujourd’hui d’un groupe phénomène pour lequel j’ai une tendresse particulière : Manowar.
I. Homme de Guerre !
« Homme de guerre » : c’est ainsi que l’Abominable et moi-même avions traduit le nom du groupe ; les traductions littérales et approximatives nous ont toujours fait rire.
Et même si cette interprétation est a priori erronée, il faut avouer qu’elle ferait sens : en effet l’affirmation d’une virilité exacerbée et la glorification de la guerre (ou plus exactement de la bataille) sont des thèmes centraux dans l’œuvre et l’imagerie du groupe.
Ces quelques pochettes de disques devraient vous en convaincre :
Vous voyez l'esprit...
Mais pourquoi donc Manowar s‘appelle-t-il Manowar ? J’ai voulu creuser le sujet...
Avec surprise, j’ai appris que les « manowars » pouvaient désigner plusieurs choses en rapport avec le monde naval et marin :
Principalement, un Man-of-war désigne un navire de guerre, sur la période allant du 16e au 19e siècle (source : Wikipedia) ; il semble que l’appellation ait été conservée pour désigner les cuirassés de l’ère moderne.
Plus drôle : le "Portuguese man o' war" désigne une bestiole marine que l’on trouve dans l’Atlantique, et qui rappelle vaguement la méduse, quoique biologiquement très différente. Gélatineux et venimeux, l'animal s'avère moyennement sympathique et plutôt dangereux. Pour autant, il ne fait pas très “métal” ;)
On peut donc se demander pourquoi les membres du groupe auraient choisi un nom désignant un navire ou une méduse, avec lesquels ils n’entretiennent pas grand rapport.
Toutefois, il faut noter que l’étymologie du terme vient bien de « man of war ». Et c’est sans doute cette origine qui aura séduit nos 4 compères métalliques.
Au final, nous avions vu juste, l’Abominable et moi !
II. Dystopies
Quels noms alternatifs aurait pu porter Manowar dans des contextes différents ?
- Si c’était un groupe entièrement féminin : WOMANOWAR
- Si c’était un groupe hippie de la période « flower power » : MANOPEACE
- Si le nom MANOWAR était déjà utilisé : BATTLEMACHO
- Si c’était un groupe québécois : MAN DE GUERRE
- Si au lieu de la guerre, leur centre d’intérêt était la cuisine asiatique : MANOWOK
- Si le groupe était constitué de méduses portugaises : MANOWAR
III. Les Cimmériens ne pleurent pas…
« Il ne pleurera pas, c’est un Cimmérien ».
Cette réplique parlera aux fans de Conan le Barbare, le film de John Milius (d'après le personnage de Robert E. Howard), avec Schwarzenegger dans le rôle-titre. Un excellent film qui a fort bien vieilli et supporte d’être vu et revu. A ne pas confondre avec sa suite (qui n’en est pas une) Conan le Destructeur, qui est un sympathique navet, mais un navet tout de même…
Conan le Barbare, et plus généralement l’heroïc-fantasy : telle est la source d’inspiration et l’univers de prédilection de Manowar. Ils puisent également dans l'histoire, dans les mythes antiques ou les mythologies viking, bref partout où il est question de batailles et d'héroïsme.
Dans leurs albums, sur leurs pochettes (souvent illustrées par Ken Kelly, disciple de Frazetta) et jusque sur scène, il n’est question que de batailles épiques, de héros musculeux, d’épées forgées dans l’acier le plus dur, de marteaux de guerre, de divinités belliqueuses et autres bersekers assoiffés de carnage.
Manowar chante le sang, le fer et le feu, le fracas des batailles, les épées s’entrechoquant, les boucliers fendus d’un coup de masse, l’honneur gagné au combat, dans la victoire ou dans la mort…
Et il faut leur reconnaître une chose : ils s’y entendent !
Outre la lourdeur du son (du heavy-metal canonique), leurs compositions font parfois preuve d’une véritable inspiration lyrique, et de grandes qualités mélodiques portées par un souffle épique. En témoignent ces formidables morceaux que sont Blood of my enemies, Battle Hymn, ou encore Hail to England.
Je ne sais pas vous, mais en ce qui me concerne, cette musique éveille en moi des élans épiques, héroïques.
Un besoin irrépressible de fourbir mes armes, d'éprouver le mordant des lames, le poids de la grande hache à double tranchant, du glaive d'airain, du marteau de guerre ; qui n'a jamais fourbi ne peut comprendre.
Sceller un destrier et chevaucher à travers la lande au triple galop, faisant tournoyer un grand fléau d'armes au-dessus de mon casque d'acier.
Monter au combat, en hurlant.
(En hurlant de douleur probablement, car j'ai atteint cet âge où de telles gesticulations ne sont plus raisonnables et où la manipulation d'armes blanches engendre douleurs lombaires et autres claquages musculaires).
IV. … mais ils grelottent en slip de peau !
J'ai parlé du nom du groupe, de son inspiration et de sa musique. Mais je n’ai pas encore évoqué l’un de ses aspects les plus caractéristiques : le look des musiciens. Attention, ça va devenir embarrassant.
En toute logique, les 4 hommes de guerre ont cherché à être raccord avec leur thématique, aussi arborent-ils fièrement des tenues, des biscottos et des accessoires de gros guerriers barbares. Enfin, censés l'être...
Mais c'est là que le bât blesse. Car les gars de Manowar sont victimes de ce que j’appellerai le syndrome du hamburger...
Tout le monde en a fait l'expérience un jour ou l'autre : alléché par les visuels des publicités, et la faim aux tripes, on s'arrête au McDo du coin en salivant à l'avance sur le beau hamburger qu'on va ingurgiter accompagné d'une généreuse dose de frites.
Dans les pubs, ces burgers sont magnifiques. Les pains sont dorés, parfaits, ronds et pleins comme un sein de femme. La viande est brillante et charnelle, grillée en surface, moelleuse à cœur, gorgée des sucs de cuisson, saisie sur le grill. La salade est d'un vert d'Amazonie, on en éprouverait le croquant rien qu'à la regarder. Et les frites semblent faites de l'or des aztèques.
Une pub pour McDo (ou consorts), c'est quasiment érotique, c'est du food-porn. C'est le fantasme, c'est le mythe.
Et puis il y a la réalité, la triste et cruelle réalité.
Le burger que l'on reçoit est mou et terne, le "bun" affaissé comme une baudruche dégonflée. La viande grisâtre a un goût de semelle, et la pauvre tranche de toastinette qui la recouvre tel un paillasson n'a même pas fondu. Une rondelle de tomate fadasse et une feuille de salade trop cuite achèvent le triste tableau. Quant aux frites, elles sont surgelées et blafardes.
C'est ce décalage entre mythe et réalité, entre le merveilleux et le trivial, entre idéalisation et déception, que j'appelle syndrome du burger.
Appliqué au cas de Manowar, voici ce que ça donne :
Achevons de faire voler le mythe en éclats, avec ces quelques embarrassantes photos :
Séance de tatouage au stylo bic... |
C'est connu, les bersekers portent des snow-boots... |
Faites péter les chamallows ! |
Aïe, la mode hard FM / glam / hair metal est passée par là, et n'a pas épargné Manukur... pardon, Manowar. |
Et l'on fait tourner les serviettes... |
Ben quoi ? Même les donjons de nécromanciens possèdent des toilettes... |
Les cuissardes, l'atout séduction du berseker ! |
Mais c'est quoi ce look de merde ?
Depuis quand les guerriers barbares portent-ils des petits slips de chippendales et des cuissardes ? Qu'est-ce que ce look homo érotique a à voir avec le heavy metal et l'heroic-fantasy ?
Les cuirs cloutés, les fausses peaux de bêtes, et surtout les épées en plastoc n'arrangent rien, vraiment rien...
C'est ce que de nos jours on appellerait un sacré fashion faux-pas ! Et même un epic fail !
V. Si la masturbation ne t'a pas rendu sourd, Manowar le fera
Le groupe détient en effet un double record dont il s’enorgueillit tout particulièrement (et l'orgueil ça les connait) : celui d'être officiellement le groupe le plus bruyant au monde. Record plutôt puéril et idiot mais qui leur vaut d'être consigné dans le Guinness Book.
D'après ce que je lis sur Wikipedia, un volume de 129,5 dB a été relevé en 1994 lors d'un de leurs concerts, et ils ont même "amélioré" ce record en 2008 avec 139 dB !
Si l'on considère qu'un niveau acceptable pour une oreille humaine demeure en dessous de 85 dB, et qu'au-delà on atteint le seuil de douleur et de nocivité, on peut se demander quel est l'intérêt d'aller voir un groupe qui nous promet la surdité.
Manowar détient un autre record, celui du plus long concert de heavy metal au monde : en 2008, un concert dura plus de 5 heures, soit une quarantaine de morceaux.
Bien heureusement ces 2 records n'ont pas été atteints lors du même concert.
Je gage que Manowar soit détenteur d'un autre record, moins métallique et plus cireux : celui de la vente de boules Quiès et autres protections auditives à l'entrée de leurs concerts.
VI. Hail to thee, kings of Metal !
Allez, je me suis bien moqué, j'ai dit plein de mal, car qui aime bien châtie bien.
Mais il est temps de rendre justice : malgré un ego démesuré, un 1er degré qui confine au ridicule, et une discographie inégale, Manowar reste un grand groupe de heavy metal et un exemple de longévité.
Je recommande plus spécialement leurs premiers albums, particulièrement inspirés :
- Battle Hymns
- Into Glory Ride
- Hail to England
- Sign of the Hammer
Dommage qu'après toutes ces années de persévérances nos "ManoWar" n'aient jamais inspiré nos armées. Les conflits seraient tellement plus rigolos. Un coup de glaive en plastique peut faire un peu mal mais reçu avec un gros fou rire ça passe sans problème.
RépondreSupprimerC'est vrai que ça aurait de la gueule !
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